Sociétés civiles : Même en SCI l’attribution des dividendes doit résulter d’une assemblée générale

02 octobre 2017

Sociétés civiles : Même en SCI l’attribution des dividendes doit résulter d’une assemblée générale

En vertu de la transparence fiscale des SCI soumise à l’impôt sur le revenu, le raccourci consistant à considérer que tout bénéfice social est dû à l’associé aux prorata de ses droits sociaux est souvent opéré ; pourtant tel n’est pas le cas.

S’il est exact que tout bénéfice social est considéré comme appréhendé par les associés à la date de la clôture de l’exercice social et donc imposé par chaque associé sur la part de bénéfice auquel il a droit en vertu des statuts, le droit à percevoir ce bénéfice n’est pas acquis tant que l’assemblée générale n’a pas procéder à la décision de distribution.

La Cour de Cassation a eu l’occasion de rappeler à de multiples reprises que les dividendes n’ont pas d’existence juridique tant qu’une décision de l’organe statutairement compétent n’a pas délibéré sur le principe de leur distribution et leur répartition entre les associés. (notamment Cass. Com 4 février 2014 n°12-23894)
Appliquée aux sociétés commerciales, par principe assujetties à l’impôt sur les sociétés (l’imposition se fait donc au niveau de la société), cette jurisprudence, constante, est unanimement admise et ne fait plus débat.

Plus délicate était la question de savoir si une telle solution pouvait être transposée à une société civile, assujettie à l’impôt sur le revenu, dans laquelle, conformément aux dispositions de l’article 8 du Code Général des Impôts, l’imposition des bénéfices se fait au niveau de chaque associé, en proportion de ses droits.

Dans une affaire dans laquelle les faits étaient, certes quelque peu différents de ceux de la présente espèce, la Cour de Cassation avait déjà jugé que cette règle n’avait pas d’incidence sur la détermination de la date de naissance de la dette de dividende de la société à l’égard des associés (Cass. Com 14 décembre 2010).

Dans un arrêt tout récent du 13 septembre 2017 n°16-13.674, la Cour rappelle avec clarté ce principe, désormais sans équivoque.
En l’espèce, une société civile immobilière, soumise à l’impôt sur le revenu, avait déclaré un résultat net bénéficiaire qu’elle avait décidé d’affecter au poste « report à nouveau ».
L’un des associés de cette SCI avait déclaré, à titre personnel, les revenus fonciers générés par la société en proportion des droits qu’il détient dans celle-ci.

Le Trésor public, titulaire d’une créance fiscale à l’égard de cet associé, a fait pratiquer entre les mains de la SCI une saisie attribution des dividendes qu’il estimait dus à l’associé.

En d’autres termes, le Trésor public constatant que l’associé avait déclaré (sur sa déclaration personnelle de revenus) des revenus fonciers, a considéré que cet associé était titulaire d’une créance de dividendes à l’égard de la société et qu’il était donc en droit de solliciter la condamnation de la SCI aux causes de la saisie.
Si la Cour d’Appel de Nîmes valide la position du Trésor public dans sa décision du 14 janvier 2016, l’arrêt est cassé par la Cour de Cassation aux motifs qu’une SCI ne peut être reconnue débitrice de dividendes à l’égard de l’un de ses associés tant que l’organe délibérant compétent (l’assemblée générale), n’a pas décidé de procéder à une distribution.

Il en résulte une dichotomie entre le droit fiscal et le droit civil puisque l’associé de SCI (soumise à l’IR), est tenu d’acquitter l’Impôt sur le revenu correspondant à sa quote-part dans les bénéfices de la société même si juridiquement il n’a pas droit aux dividendes et ne peut donc s’estimer créancier à ce titre tant qu’une délibération de l’assemblée générale n’a pas décidé la distribution conformément aux dispositions statutaires.

Il convient d'être vigilant sur la rédaction des statuts puisque bien souvent il est prévu que l'assemblée peut décider de mettre les bénéfices en résreves ou en report à nouveau de sorte que l'associé se retrouve à devoir supporter l'impôt sans percevoir sa part sur les bénéfices.

Alexandra SIX et Dimitri LECUYER
Avocats

 


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