Droit des affaires : Liquidation judiciaire et clause de réserve de propriété

23 février 2016

Les fournisseurs de marchandises sont de plus en plus souvent confrontés à des débiteurs faisant l’objet de l’ouverture d’une procédure de Liquidation judiciaire.
Lorsque les marchandises ne sont pas payées, le mécanisme de la clause de réserve de propriété a vocation à protéger le créancier, en lui assurant la propriété des marchandises jusqu’au paiement du prix.

En faisant figurer cette clause sur les factures et/ou les conditions générales, le fournisseur créancier pense être suffisamment protégé et être en droit de revendiquer auprès du mandataire, les marchandises impayées bénéficiant d’une réserve de propriété.

Les règles peuvent s’avérer plus complexes et une décision récente obtenue par le Cabinet ELOQUENCE est particulièrement éclairante, en la matière.

Dans cette espèce le fournisseur, avait livré des marchandises qui demeuraient impayées pour plus de 10 000 €, au jour où son partenaire commercial a fait l’objet de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Les factures du fournisseur comportaient une mention suivante : « Nos marchandises demeurent notre propriété jusqu’au paiement intégral ».

La revendication auprès du mandataire a été faite dans les délais, mais ce dernier s’est opposé à la revendication en se prévalant des dispositions de l’article L 624-16 al 2 du Code de commerce, qui conditionnent la revendication à une connaissance et un accord des parties sur la clause de réserve de propriété, au plus tard au moment de la livraison.
Les factures auxquelles étaient jointes les conditions générales, ne sont pas des documents établis : « au plus tard au moment de la livraison ».

Le Juge commissaire a suivi la position du mandataire en rejetant la revendication, alors même que la preuve était rapportée de l’existence de relations d’affaires entre les parties depuis plusieurs années.

Un recours a été formé contre cette décision et par un Jugement rendu le 5 janvier 2016, la Chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de SARRGUEMINES a finalement suivi l’argumentaire du Cabinet ELOQUENCE et donné raison au créancier en ordonnant la restitution des marchandises.

Le Tribunal a considéré que les parties étaient en relations d’affaires depuis des années « selon des conditions claires connues et non contestées » « mention claire figurant sur les factures pendant ces relations d’affaires », ce qui donnait force contractuelle à ces conditions, sans que le renvoi à des conditions générales ne soit nécessaire.


Dans cette espèce, c’est l’existence de relations d’affaires antérieures, qui a permis de caractériser la volonté des parties quant à l’application de la clause de réserve de propriété.

Cette décision invite à la vigilance sur la question de la clause de réserve de propriété et de la revendication de marchandises.
 
Ainsi, outre le respect des délais impératifs de revendication à l’égard du mandataire et du Juge commissaire, une réflexion s’impose quant à l’efficacité de la clause de réserve de propriété face à un débiteur en procédure collective.

Comme la décision évoquée le révèle, la simple mention d’une clause de réserve de propriété sur la facture, ou sur les conditions générales jointes à cette facture, peut s’avérer inefficace.

Dès lors, il apparait nécessaire de s’assurer que le débiteur a, avant la livraison des marchandises marqué sa volonté d’adhérer aux conditions du fournisseur, conditionnant le transfert de propriété au paiement intégral du prix.

La solution peut être de mentionner la clause de réserve de propriété sur les devis et bon de commandes signés, en joignant les conditions générales, afin d’éviter en cas de liquidation judiciaire du débiteur de perdre le bénéfice de cette clause et donc la propriété de marchandises.

Toutefois, chaque situation est différente et les entreprises particulièrement les plus petites et plus fragiles, doivent prendre conscience de la nécessité de s’interroger sur l’efficacité de leurs conditions commerciales, notamment face aux risques de défaillances de leurs partenaires commerciaux et aux règles strictes applicables en procédures collectives.   

Il est donc particulièrement utile qu'un avocat vous accompagne en conseil pour assurer l’efficacité de vos conditions commerciales et en contentieux pour faire valoir votre droit de propriété et obtenir la restitution de vos marchandises.

Hadrien DEBACKER
Avocat Associé

 


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