26 juin 2015
On le sait le contrat de franchise est reconnu comme étant le plus complexe des contrats de distribution.
Le savoir-faire du franchiseur est l’élément fondamental de ce contrat et celui auquel les candidats franchisés accordent beaucoup d’attention avant de faire leur choix.
La jurisprudence a eu l'occasion d'approfondir la notion de savoir-faire et son caractère substantiel.
On peut le caractériser comme suit pour être « franchisable »:
•Secret : c’est-à-dire peu facilement accessible aux tiers,
•Substantiel : c’est-à-dire que les informations communiquées sont originales et indispensables,
•Identifié : c’est à dire décrit aux moyens de Bibles ou de Manuels et ce précisément,
•A jour : c’est-à-dire évolutif.
Mais le seul transfert d’un savoir-faire ne constituerait au mieux qu’un contrat de communication de savoir-faire !
Le savoir-faire doit s’associer à une assistance technique et/ou commerciale du franchisé de par la mise à disposition :
•d’une marque ou d’une enseigne ou d’un logo,
•d’une stratégie de développement de réseau,
•d’une politique de commercialisation de produits et de services.
Ce savoir-faire est le résultat d’une expérimentation préalable et prospère: il est le seul gage des candidats franchisés. Aussi pour convaincre de la prospérité de son « business model » qu’il veut reproduire, le franchiseur est bien souvent tenté de communiquer au candidat franchisé un compte d’exploitation prévisionnel, qui n’est rappelons-le à ce jour aucunement une obligation légale à sa charge.
Mais, à l’évidence pour le franchiseur il est comme un élément technique qui sert, chiffres à l’appui, à emporter la conviction finale du candidat franchisé.
D’où la tentation de certains franchiseurs « d’enjoliver », ou de manquer de rigueur, le bas de page du compte d’exploitation prévisionnel transmis au candidat franchisé et de laisser apparaitre des résultats bénéficiaires en écartant soit la situation propre du candidat franchisé (formation, expérience professionnelle..) soit celle de l’activité (création ou reprise de fonds de commerce..) ou de la zone géographique dans laquelle est exploitée.
Cette absence de rigueur du franchiseur est sanctionnable et durement sanctionnée.
Aussi la jurisprudence est de plus en plus rigoureuse et sévère dans l’appréciation des éléments contenus dans le compte prévisionnel du franchiseur transmis au candidat franchisé.
Pour exemple une grande enseigne de distribution de produits en boulangerie et pâtisserie du Nord de la France s’est récemment vue condamner (CA de Paris du 7 janvier 2015) à indemniser l’un de ses franchisés à plus de deux millions d’euros d’indemnités pour un manque de prudence et d’assistance au titre de l’établissement d’un prévisionnel qu’elle a jugé « non sérieux » basé sur des éléments erronés et trompeurs.
Il existe bien d’autres causes de nullité du contrat de franchise. Il s'agit là d'un mécanisme de protection de principe du franchisé dont il doit se servir en l’absence des résultats annoncés par le franchiseur.
En vertu de cet objectif, la chambre commerciale de la Cour de cassation a consacré une cause de nullité pour erreur sur la rentabilité, par un arrêt du 4 octobre 2011.
En l’absence des résultats annoncés par le franchiseur, le franchisé n'a pas à supporter seul un échec commercial dans le cadre du contrat de franchise.
Ne l’oublions pas le contrat de franchise vise d’abord reproduire un succès commercial et non à multiplier des échecs. Il doit générer un véritable effet de levier.
Arnaud BOIX, Avocat Lille
Cabinet ELOQUENCE