Organismes de formation et sous-traitance : Risque d’assujettissement à TVA

16 décembre 2019

Les organismes de formation de droit privé peuvent être exonérés de la TVA pour les opérations réalisées dans le cadre de la formation professionnelle. En cas de sous-traitance, l’exonération peut être remise en cause par l’administration fiscale.
Il est fréquent que les organismes de formation recourent à des formateurs indépendants ponctuellement voire régulièrement. Il s’agit alors de prestations de sous-traitance.


L’administration fiscale peut estimer dans certains cas que les formations réalisées par les sous-traitants sont soumises à TVA, et ce en dépit de l’exonération dont bénéficierait lesdits organismes de formation. Les contrôles en la matière se multiplient.


1/ Champ d’application de l’exonération de la TVA pour les organismes de formation


En vertu de l’article 261-4-4° du Code général des impôts « sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée, les prestations de services et les livraisons de biens qui sont étroitement liées à la formation professionnelle continue si elles sont réalisées, soit par des personnes morales de droit public, soit par des personnes de droit privé titulaires d’une attestation délivrée par l’autorité administrative compétente reconnaissant qu’elles remplissent les conditions d’exercice de leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue."
Aux termes de cet article, les organismes de formation de droit privé ayant déclaré leur activité peuvent choisir d’être exonérées de la TVA pour les opérations réalisées dans le cadre de la formation professionnelle.


La procédure à suivre, afin de bénéficier de cette exonération, est la suivante : il convient de se procurer auprès du centre des impôts dont dépend l’organisme ou du département du contrôle de la formation professionnelle de la Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi (DIRECCTE), un formulaire d’attestation n° 3511. Ce formulaire est ensuite à adresser par lettre recommandée avec accusé de réception au département du contrôle de la formation professionnelle de la DIRECCTE.
Le département du contrôle de la formation professionnelle vérifie que l’organisme de formation est bien à jour de ses obligations en matière de déclaration d’activité, de dépôt de bilan pédagogique et financier et qu’il exerce bien une activité relevant du champ de la formation professionnelle.
La délivrance de l’attestation  entraîne l’exonération de TVA au jour de la réception par le Département du contrôle de la formation professionnelle de la demande d’attestation.
Il est précisé par la DIRECCTE que l’exonération ne concerne que les activités entrant dans le champ de la formation professionnelle ainsi que les prestations de service ou livraisons de biens qui leur sont étroitement liées : fourniture de documents pédagogiques aux stagiaires, hébergement, repas.
La facturation se fera ainsi sans mention de taxe, que le client soit ou non assujetti à la TVA. Lorsque l’organisme est exonéré de TVA au titre de son activité de formation, il précisera sur sa facture qu’il est exonéré de TVA en application de l’article 261-4-4° du Code Général des Impôts.
Toute autre opération éventuellement réalisée par un organisme de formation titulaire de l’attestation est imposable dans les conditions habituelles.


2/ Formations réalisées en sous-traitance : avec ou sans TVA ?

Au-delà de l'exonération précitée, qu’en est-il des formations réalisées par des sous-traitants suivant contrats de sous-traitance conclus avec l’organisme de formation bénéficiant de l’exonération de TVA ?
L’administration considère que si le prestataire délivrant la formation tierce n’est pas titulaire de l’attestation de formation professionnelle continue, la sous-traitance de l’opération de formation ne pourra être exonérée de TVA.


En effet, en vertu de l’article 261-4-4° du Code général des impôts précité, les prestations de services et les livraisons de biens qui sont étroitement liées à la formation professionnelle continue réalisées soit par des personnes morales de droit public, soit par des personnes de droit privé titulaires d’une attestation délivrée par l’autorité administrative compétente reconnaissant qu’elles remplissent les conditions d’exercice de leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue, sont exonérées de taxe sur la valeur ajoutée.
Cette disposition découle de la loi de finances rectificative pour 1993 relative à la transposition de l’article 13 A de la sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 n° 77/388/CEE, laquelle a été modifié par la directive de 2006.


Cependant, en cas de sous-traitance de la prestation de formation, à défaut de précision sur ce cas précis par les textes légaux, l’administration s’appuie sur des décisions de jurisprudence de la Cour administrative d’appel de Versailles et de la CJCE.


Selon la Cour administrative d’appel de Versailles (CAA Versailles, 1er février 2011), l’exonération s’applique à l’ensemble des opérations réalisées par le seul titulaire d’une attestation en cours de validité reconnaissant que celui-ci remplit les conditions fixées pour exercer son activité dans le cadre de la formation professionnelle continue ; qu’il suit de là qu’une telle exonération ne s’applique pas aux opérations de formation qui auraient été sous-traitées par le titulaire de cette attestation.
Telle est également la position de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE 14 juin 2007).
En effet, selon la directive européenne, l’organisme de formation et le tiers sous-traitant doivent tous deux être titulaires de l’attestation d’exercice délivrée par l’autorité administrative compétente pour pouvoir bénéficier de l’exonération de TVA.


Si tel est le cas, les prestations réalisées par le sous-traitant bénéficient de l’exonération de TVA sans qu’il soit nécessaire d’étudier les autres critères posés par la jurisprudence européenne pour qualifier ces prestations d’« étroitement » liées à la prestation de formation professionnelle continue.
Une réponse ministérielle en date du 30 mars 2017 confirme cette interprétation.


Pourtant, force est de constater que les organismes de formation ne sont pas informés de cette subtilité ; nombreux sont les contrôles actuels alors que leur bonne foi dans le silence des dispositions légales est évidente.


Il serait intéressant de connaître l’avis du Conseil d’Etat sur cette question et d’envisager une question prioritaire de constitutionnalité. Les praticiens ont quelques arguments pour tenter de contester les redressements de TVA en cours pour ceux qui n’étaient pas informés….

Alexandra SIX et Charyse EBENGA


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