16 février 2017
Accepter une succession peut signifier accepter l'actif mais également les dettes, il convient donc d'être prudent et de connaître ses droits avant de prendre position.
Pour se protéger des dettes successorales, trois possibilités s’offrent à l’héritier lors de l’ouverture de la succession, à savoir :
1. Soit renoncer à hériter : l’héritier, considéré comme un tiers à la succession, ne recevra rien et ne peut être tenu d’aucune dette successorale
2. Soit accepter la succession à concurrence de l’actif net (anciennement, sous bénéfice d’inventaire) : l’héritier n'est tenu au règlement du passif que dans la limite de l'actif recueilli, son patrimoine personnel étant alors protégé.
3. Soit accepter purement et simplement la succession : l’héritier sera tenu des dettes de la succession uniquement dans la limite de ses droits dans la succession. Toutefois si l’actif reçu par l’héritier ne lui permet pas de payer tout le passif, il devra engager son patrimoine personnel jusqu’au complet paiement.
Cette troisième possibilité (acceptation pure et simple de la succession) constitue un acte grave puisque l’héritier est susceptible d’engager son patrimoine personnel, et que ce choix est irrévocable : autrement dit, l’héritier qui a accepté purement et simplement la succession, ne peut plus y renoncer ni l’accepter à concurrence de l’actif net.
Il doit donc être effectué en connaissance de cause : mieux vaut pour l’héritier de connaître l’étendue de la succession et surtout du passif avant de prendre sa décision.
La difficulté survient notamment lorsque l’héritier découvre une dette après avoir accepté purement et simplement la succession.
Dans ce cas, la loi du 23 juin 2006 a prévu une atténuation à l’obligation aux dettes successorales : l’action en décharge de dette successorale, qui s’applique aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007 (c’est-à-dire aux décès survenus à compter de cette date) et s’avère soumise aux conditions édictées à l’article 786 du Code civil qui dispose notamment que :
« Toutefois, il peut demander à être déchargé en tout ou partie de son obligation à une dette successorale qu'il avait des motifs légitimes d'ignorer au moment de l'acceptation, lorsque l'acquittement de cette dette aurait pour effet d'obérer gravement son patrimoine personnel.
L'héritier doit introduire l'action dans les cinq mois du jour où il a eu connaissance de l'existence et de l'importance de la dette. »
Il s’agit de conditions cumulatives.
Dans un arrêt rendu le 4 janvier 2017 (n°16-12293), la Cour de Cassation apporte pour la première fois des précisions sur cette action.
Quelque temps après avoir accepté l’héritage de son oncle (legs universel), l’héritier se voit réclamé par une banque le paiement d’une créance d’environ 400.000 € résultant d’un engagement de caution souscrit par le défunt.
L’héritier saisit le Tribunal compétent pour demander l’autorisation d’être déchargé de son obligation à cette dette successorale.
Confirmant le jugement de première instance, la Cour d’appel a estimé que l’héritier n’avait pas été informé de la créance revendiquée par la banque lors de son acceptation pure et simple de la succession de son père, et que son consentement avait été entaché d’une erreur substantielle sans laquelle il n’aurait pas accepté la succession qui s’est avérée déficitaire.
Suite à un recours de la banque, la Cour de Cassation a estimé que la motivation des Juges d’appel méconnait les conditions propres à décharger un héritier de son obligation à une dette successorale.
En décidant que le consentement de l’héritier avait été vicié lors de son acceptation, les Juges d’appel revenaient à annuler l’option choisie. Or, l’action en décharge de dette successorale ne remet pas en cause le choix de l’héritier qui demeure acceptant pur et simple.
Ainsi, les Juges d’appel auraient dû s’en tenir aux dispositions spécifiques de l’article 786 susvisé en relevant si l’héritier avait des motifs légitimes d’ignorer la dette bancaire, si son patrimoine personnel s’en trouvait gravement diminuait et s’il avait agi dans le délai de 5 mois requis.
L’action en décharge de dettes successorales constitue une action autonome et soumise à un délai bref de 5 mois. Tout héritier acceptant pur et simple, qui est informé de l’existence d’une dette importante après son acception, se doit de réagir vite et bien.
Magalie BORGNE
Avocat associé