Droit des sociétés : Moderniser la tenue des assemblées générales par visioconférence

19 juin 2018

Les moyens de visioconférence ou de télécommunication permettent de voir et de dialoguer en temps réel avec ses interlocuteurs. En ce sens, ils introduisent une véritable souplesse dans la vie des sociétés puisqu’ils permettent aux associés de participer aux débats sans se déplacer, ce qui constitue un gain de productivité important et de modernité.

A titre liminaire, il convient de préciser que le vote par télétransmission ne doit pas être confondu avec le vote à distance (dit « vote par correspondance ») qui peut également s’exercer par télétransmission, à la différence qu’ il est reçu par la société avant l’assemblée.

En pratique, il est possible de recourir aux nouvelles technologies dans de nombreux cas, sous réserve d’utiliser des procédés fiables et performants. Dans ces conditions, les moyens usités doivent au moins transmettre la voix des participants et satisfaire à des caractéristiques techniques permettant la retransmission continue et simultanée des délibérations.

Pour autant, il convient de s’assurer de la faisabilité de ce procédé en vertu des conditions exposées ci-après.

1) L’autorisation statuaire comme préalable indispensable

La possibilité de participer et de voter par des moyens de télétransmission ne peut être mise en œuvre que si les statuts le prévoient (articles L.223-27 alinéa 3 et L.225-107, II du Code de commerce). A défaut, il convient de procéder à une modification des statuts de la société intéressée par ce dispositif. Etant précisé que, par suite, les statuts peuvent en interdire le recours, ou du moins en limiter l’usage à certaines décisions.

En pratique, les sociétés - qui permettent aux associés de voter aux assemblés par des moyens électroniques de télécommunication - doivent aménager un site internet à cet effet (articles R. 223-20-1 et R. 225-61 du Code de commerce). L’accès à ce site n’intervient qu’après identification des associés au moyen d’un code fourni préalablement à la séance (articles R. 223-20-1 et R. 225-98 du Code de commerce).

2) Les entités concernées : SA, SARL, associations et G.I.E.

- Dans les sociétés anonymes, le vote en séance par télétransmission est ouvert à toutes les SA et pour toutes les assemblées, sauf disposition contraire (article R.228-34 du Code de commerce).

L’ordonnance du 4 mai 2017 a généralisé la dématérialisation des assemblées de SA non cotées afin de favoriser ladite participation. En effet, les statuts de SA dont les actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé peuvent prévoir que les assemblées seront tenues exclusivement par visioconférence (article L.225-103-1, alinéa 1er du Code de commerce). Toutefois, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital social peuvent s’opposer à ce procédé - et donc demander la convocation d’une assemblée physique (article L. 225-103-1 du Code de commerce).

Les modalités d’application de cette mesure, ainsi que les conditions d’exercice du droit d’opposition des actionnaires, ont été précisées par le décret 2018-146 du 28 février 2018 (entré en vigueur le 3 mars 2018). Les statuts doivent désormais préciser si le droit d’opposition des actionnaires s’exerce avant ou après les formalités de convocation de l’assemblée (articles R.225-61-1 et suivants du Code de commerce).

A fortiori, lorsque l’assemblée se tient exclusivement par visioconférence ou par un moyen de télécommunication, l’émargement de la feuille de présence par les actionnaires n’est pas requis mais le procès-verbal doit préciser que l’assemblée s’est tenue par recours exclusif à la visioconférence ou à des moyens de télécommunication. Il peut être signé par signature électronique au moyen d’un procédé fiable d’identification de chacun de ses membres (article R.225-106 du Code de commerce).

En outre, il convient de préciser que le Code de commerce prévoit que l’article L.225-103-1 du Code de commerce n’est pas applicable à la société par actions simplifiée.

- Dans les sociétés à responsabilité limitée : le vote en séance par télétransmission peut être utilisé par toutes les SARL et pour toutes les assemblées.

Toutefois, la loi pose certaines réserves puisque le recours à ces techniques n’est pas autorisé pour l’adoption des décisions relatives à l’approbation des comptes annuels ou des comptes consolidés. Autrement dit, la présence effective des associés est donc requise lors de l’assemblée annuelle obligatoire statuant sur l’approbations des documents comptables de la société ou du groupe.

Par ailleurs, les statuts peuvent prévoir un droit d’opposition à ces techniques au profit d’un nombre déterminé d’associés et pour une délibération déterminée (article L. 223-27 alinéa 3 du Code de commerce).

- S’agissant des associations et des groupements d’intérêts économiques (GIE), rien ne semble interdire que les statuts prévoient une participation aux débats et un vote par un procédé de télécommunication dès lors qu’il permet l’identification des intéressés.

La visioconférence est donc un procédé désormais permis mais ses conditions d’applications et de mises en œuvre ne sont pas si simples…

Alexandra SIX
Avocat en droit des affaires

Annabelle Deplanque                                                                                                                                                                                                                        stagiaire


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